Après 10 jours passés à l’Isha Yoga Center, j’ai pris le train pour retourner dans le sud du Kerala, à Marari Beach, une petite station balnéaire qui m’avait séduit par sa douceur et son calme étonnant. Sur sa longue plage quasi déserte après avoir été balayée par un tsunami il y a quelques années, on peut courir des kilomètres sur le sable fin en pleine nature et contempler la vie simple des villageois, des pêcheurs et des enfants construisant des cabanes dans les arbres ou jouant avec les chiens errants. Une ambiance où le temps semble suspendu. La boucle en Inde du sud était bouclée et je serais bien rentré en France si ce n’était pas encore l’hiver, et puis, dans mon programme, il me restait à visiter le Sivananda Yoga Ashram à Neyyar Dam, un lieu isolé en montagne, entouré de forêts et au bord d’un grand lac artificiel.
Cela fait environ 10 ans que je pratique quotidiennement le yoga (la partie asanas) en autodidacte, à partir de livres et de vidéos Youtube, à la suite de blessures en course à pied, notamment une sciatique. Comme je n’avais jamais pris de cours, ma pratique était surtout basée sur le ressenti et je ressentais justement le besoin de structurer mes séances. C’est avec cette simple ambition que mes pas m’ont conduit dans cet ashram, pour y suivre un programme gratuit de 2 semaines : le “Yoga Vacation”, sans jamais avoir entendu parler du maître spirituel hindou Sivananda (1887-1963). C’est pourtant ce personnage vénéré qui, à Rishikesh au nord de l’Inde, a fondé la Divine Life Society dont l’objet est d’œuvrer pour la paix et la formation de citoyens pratiquant un « yoga intégral ». Un yoga que l’on peut résumer en ces mots : Servir, Aimer, Donner, Purifier, Méditer et Réaliser (le Soi). C’est grâce à l’un de ses disciples les plus connus, Vishnudevananda, que ce yoga intégral s’est fait connaître sur toute la planète et qu’il existe aujourd’hui 11 ashrams proposant des programmes et des formations pour devenir prof de Yoga. Fort de son succès à l’international, Rishikesh s’est imposé comme étant le berceau du yoga.
Fondé en 1978, l’ashram de Neyyar Dam est l’un des plus anciens et des plus réputés. L’édifice, idéalement ombragé pour faire face aux chaleurs de l’Inde est impeccablement tenu avec de belles allées, des peintures murales, des jardins soignés, des statues et de grandes salles de pratique. Chaque jour, quelque 250 visiteurs venus de la terre entière sont encadrés par des professeurs compétents pour découvrir ou perfectionner leur pratique du yoga intégral tout en s’immergeant dans la vie rythmée d’un ashram avec son lot de règles.
Comme à chaque fois en arrivant dans un tel lieu, où il n’est pas vraiment permis de sortir ni de manger dans sa chambre, j’apporte ma propre réserve de fruits que je stocke sous mon lit en redoublant de vigilance pour que les fourmis ne trahissent pas mon secret. Ensuite, ma priorité consiste à m’assurer que je vais pouvoir me réapprovisionner pendant la durée de mon séjour. Si ce n’est pas possible, je jeûne ou alors je m’en vais. Cet alignement ferme avec mes valeurs ne m’a jamais privé de quoi que ce soit, au contraire, il m’offre des opportunités étonnantes. Comme à Vipassana où l’un des servant était frugivore et s’est arrangé pour que je puisse manger végétal et cru pendant la retraite ! Chez Sivananda, j’ai pu compter sur deux petites boutiques de fruits qui avaient tout le nécessaire, y compris des cocos et du jackfruit !
Une fois rassuré sur ces points, j’ai pu pleinement apprécier la richesse et la qualité des enseignements théoriques et pratiques dispensés. Le rythme quotidien était de 4h de yoga, 3h de satsang, 1h30 de théorie et 1h de karma yoga sans compter les activités optionnelles. Cela m’a laissé quelques heures de libres pour lire et écrire si bien que je me suis assez vite senti comme un poisson dans l’eau avec ce mode de vie proche de mon quotidien. Avant de partir en Inde, je me visualisais chanter des mantras avec émotions et l’occasion ne s’était pas encore produite. Chez Sivananda je me suis bien rattrapé car ici on chante 1h matin et soir, ainsi qu’en début et fin de chaque activité. J’ai beaucoup apprécié les chants qui m’ont ému et fait verser des larmes de joie.
Venu avec la seule ambition de gagner en souplesse et en mobilité, cet ashram s’est révélé être, après Vipassana, la plus belle surprise de ce voyage en Inde, bien au-delà de mes espérances. J’étais venu sur cette terre sacrée pour y trouver l’inspiration en vue de créer l’école pratique du vivant et c’est ici que je l’ai trouvée…
Après un séjour de 2 semaines à l’ashram Sivananda de Neyyar Dam pour suivre le programme “Yoga Vacation”, je suis retourné à Kovalam dans mon environnement préféré : le bord de mer. J’ai repris avec plaisir mes petites habitudes : méditation, mouvements, chant et baignade le matin et le soir. Entre les deux : lecture, écriture, gestion de l’activité professionnelle, sans oublier la balade au marché pour faire le plein de fruits. Une vie belle et simple, celle que j’ai choisie, même si je serai ravi de retrouver une vie sociale plus riche en France.
J’étais content de partir en Inde et je suis tout aussi heureux de rentrer au bercail lundi prochain. Tout est donc parfait et je savoure pour quelques jours encore le soleil généreux de l’Inde, ses plages et ses délicieux fruits exotiques. Le programme qui m’attend dès mon retour est déjà bien rempli jusqu’à la fin de l’été alors ce temps calme à Kovalam est le bienvenu pour dresser le bilan de ces 5 derniers mois durant lesquels j’ai :
-Participé à un stage de désarmement
-Vécu l’expérience d’une retraite Vipassana (cf cet article sur la méditation Vipassana)
-Suivi la formation en ligne “Ingénierie Intérieure” de Sadhguru.
-Suivi le programme “Yoga Vacation” dans un ashram Sivananda.
-Visité 6 ashrams + Auroville
-Lu une quinzaine d’ouvrages sur l’hygiénisme
-Simplifié mon alimentation pour ne manger que des aliments bruts et sans gras (cf cet article sur nos besoins en lipides)
-Refait l’intégralité de mon site web
-Appris à être davantage patient…
-Soigné mon intolérance à la musique forte et au bruit…
Ces dernières années j’étais quelque peu nostalgique des expéditions de mon passé d’aventurier car je ne pensais pas revivre des expériences engageantes où l’on sent qu’il y a un avant et un après. Cependant, le bilan de ce périple indien, avec son intensité et ses enseignements, m’a réconcilié avec la nouvelle forme que prennent mes explorations.
L’Inde a donc tenu ses promesses et je vais rentrer rempli d’inspirations et d’idées pour avancer sur mon projet de création de l’école pratique du vivant. Les prochaines étapes consisteront, au cours de l’année, à poursuivre la visite de lieux inspirants en France, créer une association et terminer l’écriture du premier manuel de l’école.