“Only when nutritious and pure food is taken will pranayama bestow its glorious fruits upon the practitioner.” Vishnudevananda
“Health is wealth. Peace of mind is happiness. Yoga shows the way.” Sivananda
“Ne savez-vous pas que votre corps est le temple du Saint-Esprit qui est en vous, que vous avez reçu de Dieu ?” Corinthiens 6:19
Tu trouveras dans cet article une synthèse de mes apprentissages en Inde ainsi que la vision de l’école pratique du vivant que je nourris. Bonne lecture !
Introduction
Le yoga (du sanskrit « union, joug, méthode», « mise au repos») est une philosophie liée depuis l’origine à la pratique du jaïnisme ou jinisme (du sanskrit jina, « vainqueur » et mata « doctrine »), une religion qui aurait commencé à apparaître vers le Xe siècle av. J.-C. Le yoga est une discipline ou pratique commune à plusieurs époques et courants, visant, par la méditation, l’ascèse et les exercices corporels, à réaliser l’unification de l’être humain avec le cosmos, à réaliser le Soi et à se libérer du cycle des renaissances, le samsara. Au cours des siècles, la philosophie du yoga a progressivement été codifiée dans plusieurs textes de références comme les Yoga-sûtra, la Bhagavad-Gîtâ, les Védas et les Upanishad. Ces écritures sacrées ont influencé de nombreux penseurs et ils sont, pour une bonne part, la source d’inspiration du renouveau de la spiritualité en occident. On leur doit, entre autres, le concept de non-dualité et la loi de l’impermanence.
Les 4 voies traditionnelles du yoga
Il existe quatre voies traditionnelles majeures du yoga qui sont le karma yoga, le bhakti yoga, le raja yoga et le jnana yoga.


Le karma yoga – le yoga de l’action désintéressée
Le karma-yoga repose sur deux grands principes : en premier lieu, un profond respect pour le travail entrepris ; en deuxième lieu, une indifférence complète à ses fruits. Toute idée d’obtenir quelque chose en récompense du travail accompli entrave le développement spirituel et finit par apporter la souffrance.
En plus de ce détachement vis-à-vis des résultats des actions entreprises, le karma-yogin ne doit pas se considérer comme l’auteur de l’action, mais agir comme un instrument dans le travail, de manière impartiale et impersonnelle, avec effacement de son ego et équanimité. La finalité du karma-yoga est la libération de tout karma grâce au non-attachement à l’action et à ses fruits.
Le bhakti yoga – le yoga de la dévotion
Dans la Bhagavad-Gîtâ, la pratique du karma yoga est combinée à celle du bhakti yoga qui est un chemin spirituel basé sur l’amour, la foi et l’abandon total à une divinité (comme Krishna, Rama, Shiva, Vishnu, ou la Mère Divine). L’idée centrale est que, par un amour pur et désintéressé pour le divin, on peut s’unir à lui. La dévotion dans son sens le plus large inclut également la foi et la gratitude envers les maîtres spirituels et leurs enseignements.
Les pratiquants du bhakti yoga cherchent à entrer en contact avec le divin au moyen de prières, de chant dévotionnels, de récitation de mantras ou de noms de Dieu, de pujas, de satsangs, d’offrandes, de services, de charité, de célébrations de rituels, de méditations sur une image sacrée, etc.
Note : Certaines branches du jaïnisme refusent le culte des idoles, tout comme les enseignements du Bouddha.
Le raja yoga – le yoga de la méditation et de la maîtrise du mental
Le raja yoga (qui signifie yoga « royal ») est également appelé ashtanga yoga (« yoga à huit membres »). C’est dans ce yoga que l’on retrouve le code moral qui représente le préalable à toute pratique yogique, à savoir :
- Ne pas tuer et considérer toute forme de vie.
- Ne pas voler et s’abstenir de prendre ce qui n’est pas donné.
- Ne pas mentir et avoir une parole impeccable.
- La modération des sens et avoir une sexualité saine et respectueuse.
- S’abstenir de consommer des intoxicants (drogues, alcool et tout autre substance addictive).
C’est au Raja Yoga que l’on doit les pratiques comme les asanas, les pranayamas et la méditation. On y retrouve aussi l’importance de développer certaines vertus comme l’équanimité, le détachement, la pureté, l’abandon, la non-possessivité, la non-violence, le contentement et la connaissance de soi.
Le jnana yoga – le yoga de la sagesse et de la connaissance de soi
Le jnana yoga est un chemin introspectif et philosophique qui mène à la libération (moksha) par la connaissance directe du Soi (Atman) et de sa non-séparation avec l’absolu (Brahman). C’est le yoga de ceux qui cherchent la vérité à travers la réflexion, la contemplation et la discrimination intellectuelle entre le réel et l’irréel (maya). La perception de cette réalité est obscurcie en l’homme par la fausse idée qu’il a de lui-même et du monde, l’empêchant de vivre la plénitude de l’unité.
La Conscience pure, appelée Brahman (le Soi universel), est présentée comme le substrat de l’univers, à partir duquel apparaissent le monde et aussi la conscience individualisée. Le monde tout entier n’est pas ce qu’il semble être : il n’a pas d’existence indépendante, il est la manifestation d’une réalité ultime, il est une simple apparence, et il surgit par le jeu de maya, le pouvoir créateur inhérent au Brahman.
Les points faibles du Yoga Intégral
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Le corps physique
L’habillement
Tous les ashrams ont des règles monastiques pour maintenir un certain ordre et garantir une atmosphère propice à l’étude et l’apprentissage. Une des règles communes à tous les ashrams est d’ordre vestimentaire. Tous sont tenus de porter un pantalon (non moulant) et un haut avec des manches (sans décolleté) quelle que soit la chaleur. Le problème majeur avec cette règle c’est que la peau n’est que très peu exposée à la lumière et, pour les personnes résidant sur place plusieurs semaines ou mois, cela entraîne des carences en vitamine D.
Pourtant, à l’origine, les yogis comme Sivananda pratiquaient la salutation au soleil face au soleil (quand il est proche de l’horizon) et en culotte courte (cf photo). Les asanas de la salutation duraient environ 15-20 minutes, un temps calculé pour que le corps ait quotidiennement son quota de vitamine D. Une pratique hélas tombée aux oubliettes.
La nourriture
Elle est constituée à 95% d’aliments cuits, principalement des féculents avec des sauces épicées et des légumes cuits. Les fruits et légumes crus, pourtant nourriture sattvique par excellence, font figure de décoration dans les plats. Comme j’ai pu l’observer à maintes reprises, ceux qui se nourrissent majoritairement de féculents générateur de colles (cf cet article sur les méfaits des féculents) finissent par cracher et tousser fréquemment. En outre, bien des visiteurs dans les ashrams recherchent des fruits et légumes, preuve que le besoin d’aliments frais n’est pas comblé par la nourriture proposée, qu’elle soit étiquetée ayurvédique ou non (cf cet article sur les médecines traditionnelles).
La tradition yogique a compris l’importance d’avoir une alimentation la plus pure possible mais dans l’ensemble les yogis ne brillent pas, malgré toutes leurs pratiques, par leur bonne santé et leur longévité. En revanche, Gandhi qui avait une alimentation végétale et crue, et jeûnait régulièrement (cf son autobiographie), était encore très actif physiquement à l’âge de 78 ans au moment de son assassinat.
Les êtres humains qualifiés de saints ou d’éveillés ont souvent la réputation de prendre sur eux les maux de l’humanité ce qui justifierait leur médiocre état de santé et leur mort précoce. Je vois là les limites de la dévotion qui empêche les fidèles de remettre en cause certains aspects des enseignements. C’est pourtant cet état d’esprit critique, loin de tout dogmatisme et idolâtrie, qui aurait été enseigné par le Bouddha (cf cet article sur les enseignements de Vipassana). De son côté, Jésus aurait recommandé l’alimentation végétale et crue (cf “Les Evangiles Esséniens de la paix” de Bordeaux Szekely) et de prendre soin du corps comme étant le temple de l’Esprit. Et à en croire la Bible, la spiritualité et la connexion au divin n’empêchent nullement d’atteindre de grands âges…
Certains objecteront encore que l’Esprit à l’ascendant sur le corps, et c’est vrai ! Mais devons nous seulement compter sur les miracles et la prière pour se soigner (cf la vidéo sur l’insolence des miracles) ? Même si l’on peut transcender la maladie par l’éveil, est-ce une raison pour négliger le corps, ce temple de l’esprit ? A travers les âges, depuis environ 2 millions d’années, l’humain s’est progressivement détourné de l’alimentation frugivore et du mode de vie pour lequel il est originellement conçu. Notre génétique d’une prodigieuse adaptabilité a atteint ses limites comme on peut le voir avec les épidémies en tout genre et il est temps de renouer avec l’alimentation originelle (cf cet article sur l’origine de l’alimentation vivante).

Le mouvement & le renforcement
Les asanas tels qu’enseignés dans le Yoga Intégral forment un enchaînement divinement orchestré pour réharmoniser le corps et le préparer aux longues heures de méditation. Cependant, on ne fait pas que méditer dans la vie, on se déplace aussi ! Certaines méthodes contemporaines excellent dans l’art du mouvement et ouvrent de nouveaux horizons en termes de mobilité et de pleine santé. Parmi elles, on peut citer : l’animal flow, le Parkour Primal ou certaines écoles de mouvements (cf Ido Portal et Roye Gold).
Plus généralement, l’activité physique et l’exposition aux éléments (cf cet article sur l’hormèse) font partie de nos besoins biologiques et contribuent pour une bonne part à se sentir bien physiquement et psychologiquement.
Le toucher
Un autre besoin absent du yoga intégral est le toucher. Qu’il soit thérapeutique, magnétique ou simplement chargé de bonnes intentions, nous avons tous besoin d’être touchés physiquement.
La sexualité
Il est regrettable que la sexualité, préalable à la naissance de toute vie, et art sensuel que l’on doit à nos 800 000 capteurs sensitifs sur la peau, ne fasse pas partie des enseignements d’un yoga qui se veut intégral. Que ce soit à l’ashram Sivananda ou à l’Isha Yoga Center, la sexualité est vue comme une compulsion qui fait perdre de l’énergie et qui éloigne du but ultime : la réalisation du Soi. Cette énergie sexuelle, dont on va même jusqu’à dénier l’existence dans le yoga, est pourtant vue comme une énergie créatrice sacrée dans le tantra, le tao et le célèbre Kama Sutra. Osho l’avait également mise à l’honneur dans ses enseignements et l’homme n’en était pas moins spirituel que ses contemporains.
Il y aurait pourtant tant à dire sur la sexualité et l’énergie sexuelle (un article sera consacré à ces sujets au cours de l’année). Comme le fait que l’éjaculation est une addiction due à des traumas non résolus et qu’il est possible de la dépasser grâce à des techniques de rétentions séminales qui permettent justement de ne pas gaspiller cette précieuse énergie créatrice.
Nous avons besoin de comprendre le mode d’emploi du corps humain sous tous ses aspects, y compris les plus intimes, plutôt que de les botter en touche ou, pis, de jeter la honte sur les plaisirs charnels et l’onanisme comme l’ont fait les religions, ce qui a eu pour seuls résultats de déconnecter un peu plus l’humain de lui-même et de créer des perversités.
- La technique de méditation
La technique de méditation enseignée dans le Yoga Intégral consiste à utiliser la respiration, la répétition de mantras, des sons et des visualisations pour favoriser la concentration de l’esprit. J’ai utilisé cette technique de méditation pendant 10 ans jusqu’à ce que je découvre une autre technique beaucoup plus efficace et profonde : la méditation Vipassana (qui signifie “voir ce qui est”) que l’on doit au Bouddha. D’après ses enseignements, seule la méditation Vipassana, qui n’emploie aucun artifice comme les visualisations, est à même de changer en profondeur l’esprit et d’apporter des changements pérennes.
Pour en savoir plus, lire cet article sur Vipassana et comment remédier à la souffrance avec la méditation.
- La foi et la dévotion
Les manifestations de foi et de dévotion que l’on retrouve dans le bhakti yoga impliquent souvent l’adhésion à un culte religieux et elles peuvent émousser l’esprit critique. Parfois, dans les temples, je me suis demandé où finissait la dévotion et où commençait le fanatisme. La foi et la dévotion devraient avant tout se manifester dans la diligence à suivre les enseignements et à devenir son propre maître.
D’ailleurs, dans les retraites Vipassana qui sont au plus près des enseignements du Bouddha, tout rituel est proscrit afin de détacher la pratique de toute religion et de la rendre ainsi universelle. Il est dit lors de ces retraites que : “La foi et la dévotion deviennent des ennemis si elles sont aveugles. Elles doivent être accompagnées de sagesse. La dévotion est comme les jambes pour avancer sur le chemin et la sagesse est les yeux pour avancer dans la bonne direction. »
A Auroville (cf cet article du Rawd Trip) il n’y a pas de place non plus pour la religion et les rituels. Le centre de la ville est simplement marqué par la présence d’un très vieux figuier banian ceint de la mention : « La cité au service de la vérité”. Et dans la Matrimandir, lieu hautement spirituel où des milliers de visiteurs se succèdent chaque jour, on médite dans le silence dans un pièce blanche autour d’un cristal sphérique éclairé par le soleil.
Le chamanisme me paraît être un complément adéquat pour remplacer les chants et les cérémonies à caractère religieux par d’autres universels, dédiés à la nature, à Gaïa et les êtres qui la peuple.
Vers un yoga de la nature
Chaque siècle qui passe voit l’humain se déconnecter un peu plus de la nature et s’affaiblir. Il ne fait désormais de doute pour personne qu’il est nécessaire d’apprendre une nouvelle manière de vivre, de penser, de communiquer, de cultiver la terre, etc. Et si le temps était venu d’unir ces monuments de sagesse que sont le yoga, l’hygiénisme, le tantra et le chamanisme pour créer un nouvel art de vivre qui soit simple, harmonieux et universel ? Que le but final ne soit pas seulement l’éveil mais aussi la pleine santé sur tous les plans, la réalisation du Soi conjugué à la pleine santé. Bref, retrouver un esprit sain dans un corps sain. C’est cette union entre ces disciplines maîtresses, que l’on pourrait qualifier de yoga de la nature, que je souhaite créer au sein de l’école pratique du vivant.