Quid de la vie sociale et de la fréquence des repas ?

« Je ne vois qu’un moyen de savoir jusqu’où l’on peut aller : c’est de se mettre en route et de marcher. » Henri Bergson, « La conscience de la vie » (1911)

« Un quart de ce que l’on mange nourrit notre corps, le reste nourrit le médecin .» Inscription gravée sur une pyramide égyptienne, 3800 av J.-C.

«Pour atteindre à la Vérité, il faut, une fois dans sa vie, se défaire de toutes les opinions que l’on a reçues, et reconstruire à nouveau, dès le fondement, tout le système de ses connaissances ». René Descartes

«  Tant qu’il y aura des hommes qui n’obéiront pas à leur raison seule, qui recevront leurs opinions d’une opinion étrangère, en vain toutes les chaînes auraient été brisées. » Le marquis de Condorcet

Je suis passé à l’alimentation vivante presque du jour au lendemain, ce qui a eu des répercussions sur bon nombre de mes fréquentations.

Si bien que j’en suis venu à m’interroger sur les motivations profondes qui nous poussaient jusqu’alors à nous réunir chez les uns et les autres.
Je pris pleinement la mesure du mot convivialité qui vient du latin « convivialis », signifiant « relatif au repas pris en commun ».

Sous couvert de convivialité et d’un soi-disant art de vivre, j’ai le sentiment que chez l’être humain, tous les prétextes sont bons pour éprouver le plaisir de phagocyter.
Encore une fois, nous sommes inconsciemment les victimes de l’inadéquation grandissante entre notre héritage culturel remontant à la nuit des temps et notre nouvel environnement obésogène. C’est-à-dire la disponibilité accrue de nourriture, la motorisation des déplacements et la sédentarisation des jeux et loisirs.
Un héritage qui nous invite à ripailler alors que les périodes de restrictions alimentaires ont disparu et que tout est mis en œuvre pour nous éviter soigneusement le moindre effort physique.

À cela s’ajoute un manque d’imagination de notre part, de ne savoir faire autre chose ensemble que de manger.
La digestion d’un repas pris en commun est le moyen sûr de mettre nos âmes au diapason, faute de mieux.

Observez ses congénères avec le regard d’un éthologue créé un sentiment de dissociation troublant vis à vis de sa propre espèce, on éprouve alors le besoin, par moment, de se retirer dans une grotte pour échapper à la folie ambiante contagieuse.
Mais tout retour en arrière était impossible, je ne pouvais faire comme si je ne savais pas et mes relations sociales furent affectées.

Cela ne m’a aucunement chagriné car je me suis toujours senti différent des autres, au moins j’avais une bonne raison pour ça maintenant. J’ai vécu cette transition comme lorsque l’on change d’école, on abandonne certains jouets et on se fait de nouveaux amis.
Parmi mes camarades de jeux, rares étaient ceux qui osaient encore m’inviter à table et il ne serait venu à l’idée de personne de me rendre visite sans un panier de victuailles.
Habitués à me voir manger de tout, de surcroît avec un bon coup de fourchette, cette apostasie avait de quoi les surprendre mais n’expliquait pas le froid qu’elle avait jeté sur nos relations.
Je finis par comprendre que les habitudes alimentaires sont recouvertes d’un voile, tissé par les habitudes et l’atavisme, que l’on ne retrousse pas impunément pour en comprendre le mécanisme.

Si bien qu’aujourd’hui encore, j’évite les repas en commun et le supplice de la chaise qui lui est associé.

Je suis libéré de cette corvée à laquelle quelques milliards d’êtres humains s’astreignent fidèlement trois fois par jour minimum avec une ascèse exemplaire qui se passe de l’appel du muezzin.

Cette remise en cause du bien fondé de nos habitudes alimentaires est allée encore plus loin car j’avais définitivement perdu confiance en notre héritage gastronomique. La sphère des croyances ne s’arrête pas à la religion, elle imprègne toutes nos existences, obscurcissant même le royaume de la science.
Dans tout domaine quel qu’il soit, qui est désormais capable de vérifier un information ?
La connaissance connaît tellement de ramifications et de conflits d’intérêts que seule une poignée de spécialistes est aujourd’hui capable d’avoir un avis éclairé sur leur seul domaine respectif.
Nous ne pouvons donc que les croire sur parole (quand ils ne se contredisent pas) en prenant soin de toujours conserver un esprit critique, sans pour autant voir des complots partout.

Seules les Lois du vivant sont accessibles à tous à la condition sine qua non de se livrer à ses propres expériences, en prenant son corps et son esprit pour sujet d’étude.
Il appartient à chacun de vivre son corps comme une éprouvette.
Revenons alors à notre frêle constitution biologique dépendante de trois repas par jour sans compter les collations, cafés et clopes (je les associe car le café est une addiction au même titre que le tabagisme).
Cette triade sacrée (petit déjeuner, déjeuner, dîner) est considérée comme un art de vivre, pourvoyeuse de plaisirs dont il faudrait être bien bête pour se priver volontairement !
Remettre cette triade en cause est une hérésie, une provocation insoutenable pour bien des honnêtes gens, signe infaillible que l’on touche précisément à une croyance.

Rares sont ceux capables de sauter un seul repas, et pour cause, le rituel des trois repas à heure fixe cache une dépendance.
Étudions de plus près l’origine de cette addiction alimentaire ignorée du commun des mortels.

Portons notre regard vers l’intérieur, vers notre intimité, lorsque notre corps nous dit « j’ai faim ».

Les céréales ne font pas partie de notre régime alimentaire naturel (cliquez ici pour lire l’article Manger vivant ? ).

Elles ont été introduites, avec les produits laitiers, au début du Néolithique, il y a 10 000 ans environ.
C’est à cette période que l’on observe l’apparition fréquente de caries dentaires alors qu’elles étaient quasi inexistantes chez les chasseurs-cueilleurs.
En outre, l’espérance de vie à chuté chez ces pionniers de l’agriculture dont la taille moyenne est passée de 1m73 (au Paléolithique) à 1m63 (au Néolithique), signes que les conditions de vie étaient moins favorables sous l’ère agricole.
Il a fallu attendre les années 1970 pour que l’homme retrouve sa stature initiale et ne la dépasse de 3 cm à l’heure actuelle, indéniablement grâce à l’amélioration des conditions de vie, au développement de la médecine et de l’agronomie, sans que l’on puisse pour autant ignorer l’effet collatéral des hormones de croissance données aux animaux d’élevage.

Si les céréales sont une manne pour affranchir l’humanité de ses besoins glucidiques, le revers de la médaille, c’est que l’amidon (une chaîne de glucose) des céréales et à plus forte raison le sucre industriel (la consommation moyenne de sucre industriel par jour et par habitant en France est actuellement de 100 grammes, au XIXème siècle, elle était de seulement de 5 grammes), sans oublier les jus de fruits (il y a un parallélisme entre la consommation de fructose ajouté ou de jus de fruits et la fréquence de l’obésité), font grimper trop rapidement le taux de sucre dans le sang. A la différence des fruits et légumes dont la présence de fibres change la donne en ralentissant l’absorption.

Dans le langage courant, le terme « sucre » peut se rapporter à un ose quelconque. Sur un étiquetage nutritionnel, le terme « sucres » désigne tous les glucides ayant un pouvoir sucrant, essentiellement le fructose, saccharose, glucose, maltose et lactose. Le sucre blanc (ou saccharose) contient 50% de glucose et 50% de fructose, les fruits contiennent majoritairement du fructose. Le fructose a un pouvoir sucrant supérieur au saccharose, de 20 à 40 %, ne provoque pas d’hyperglycémie soudaine chez les sédentaires l’utilisant et il ménage les dents, étant donné que les bactéries doivent mettre plus de temps pour le digérer et produire leurs rejets acides.

Or l’augmentation rapide du taux de sucre dans le sang provoque une hyperglycémie, qui, si elle est répétée, est particulièrement néfaste pour les tissus corporels (comme le savent à leur dépens les diabétiques) en plus d’engraisser le foie.

C’est pourquoi notre pancréas réagit par une forte et urgente production d’insuline, souvent en trop grande quantité, qui va stocker ces sucres excédentaires sous forme de graisses, les triglycérides.
Cette production élevée d’insuline, en réponse à la consommation d’aliments libérant trop vite du sucre, fatigue à long terme le pancréas et à court terme, provoque une hypoglycémie qui a lieu environ 4h après la prise alimentaire et qui coïncide avec une précision d’horloger à l’heure du repas ou de la collation suivante.

Voilà le premier des trois rouages qui incite à manger à de multiples reprises au cours de la journée : l’hypoglycémie due à une alimentation contenant des céréales et du sucre industriel.

À cela, s’ajoute le processus d’auto nettoyage de l’organisme qui s’enclenche dès que la digestion est finie, un processus qui ne peut guère fonctionner que la nuit lorsque l’on mange trois fois par jour.

Lire à ce sujet « Et si on s’arrêtait un peu de manger…de temps en temps » de Bernard Clavière pour de plus amples informations sur les mécanismes du jeûne et ses effets sur le corps humain.

Ce nettoyage a des effets secondaires indésirables, plus particulièrement chez les individus qui n’ont jamais jeûné, et ce, d’autant plus que l’organisme est intoxiqué par de mauvaises habitudes alimentaires.

Esprit confus, manque d’entrain, anxiété, mauvaise humeur, vue trouble, langue chargée, acné, mauvais haleine, besoin de se moucher, visage tuméfié, raideurs, vertiges, fatigue générale, etc, sont des symptômes familiers à des milliards d’êtres humains au réveil, ceux-là même qui se croient favorisés par le progrès.

Le petit-déjeuner, en stoppant provisoirement ce nettoyage aux effets indésirables, apparaît alors comme le sauveur.
C’est pourquoi, contrairement à ce que prétend la sagesse populaire, le petit-déjeuner serait plutôt le repas le plus nocif de la journée puisqu’il interrompt un processus de nettoyage salutaire qu’il convient de laisser fonctionner un peu chaque jour.

Pour quelle raison étrange, après une nuit de sommeil, aurions-nous besoin de stimulants pour démarrer une journée ? En outre, on observe qu’un corps nourrit sainement n’a pas faim le matin.

D’ailleurs, tout le règne animal dort ou se repose après avoir mangé, il est contre nature et même contre-productif de partir travailler le ventre plein, les sportifs le savent bien.

La science a largement démontré que la réduction calorique accélère la neurogénèse. On croit généralement que des adultes ne fabriquent plus de neurones, mais c’est faux. Et ce processus est accéléré quand vous jeûnez. Davantage de neurones sont fabriqués dans l’hippocampe. Cela à même donné l’idée à une start-up californienne de faire jeûner ses employés pendant 36h pour booster la productivité. Si les fins sont discutables, la méthode elle a prouvé encore une fois son efficacité.

Le dernier mécanisme qui nous conditionne opère dans le domaine psychologique.
Lors du stade fœtale, le placenta qui nous a nourri était riche en glucides, tout comme le lait maternel (ou de substitution).
C’est pourquoi nous avons, au-delà de nos besoins physiologiques, une grande appétence pour le sucré, surtout en période de stress.
En stimulant la production d’hormones et de neurotransmetteurs, il nous rassure et nous ramène inconsciemment à une époque fusionnelle avec notre mère ou à des moments heureux de notre enfance, comme peut le faire une odeur.

Ensuite, il y a l’éducation, ou plutôt le dressage : repas à heure fixe et obligation de finir son assiette, un système qui heureusement est en train de vivre ses derniers jours.
Ce conditionnement opéré depuis la tendre enfance laisse des traces presque indélébiles dans notre disque dur mental si bien que changer ses habitudes alimentaires demande une volonté conséquente.

Mais toutes mes lectures et expériences personnelles m’avaient convaincu que manger trois fois par jour tous les jours était une folie, une aliénation, symptomatique d’un corps mal nourri (en dépit de l’abondance) qui tôt ou tard finirait par « tomber malade ».
Suite à ces considérations je n’avais plus le choix, je ne pouvais continuer dans cette voie de garage.
Les difficultés à surmonter ne pouvaient rentrer en ligne de compte.
J’ai ainsi pris l’habitude de supprimer le petit-déjeuner pour ne faire que deux repas par jour en fonction de mon emploi du temps, ce que l’on appelle le jeûne intermittent.

Merci

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